samedi 15 mars 2008

Une autre lecture de Proust.

« Je l’avoue en effet : les passages que j’aime le moins, chez Proust, ceux que je relis avec le moins de curiosité, ce sont ces résurrections qui émergent, précisément, de sa « seconde mémoire » - à commencer par l’histoire de la madeleine, qui m’a toujours fait penser à une « narration » de classe de troisième (« Tout Combray (…) est sorti de ma tasse de thé », c’est faible, comme dernière phrase ; ces évocations d’impression, à propos des noms de lieux, d’habitudes domestiques, de changements de saisons ; ces découvertes désabusées d’endroits familiers devenus rétrécis et méconnaissable quand on y retourne après un long temps ; ces amalgames d’un nom et d’une image, d’un sentiment et d’une circonstance, d’un bruit de calorifère et d’une période de la vie, d’une odeur et du souvenir d’un grand amour –oui, tout cela est vrai, tout cela nous arrive, mais il faut bien le dire, n’a guère d’intérêt que pour nous-mêmes. Parfois on ne voit vraiment pas pour quelle raison, en dehors de celle que cela lui est arrivé à lui, Proust s’étend longuement sur certaines choses.

Et que l’on me comprenne bien : c’est la chose qui m’ennuie, et non pas la longueur ; car si l’on appelle brièveté le fait de ne rien écrire qui n’exprime une nouvelle idée, le style de Proust est en général un des plus rapide qui soient, sauf, précisément, dans les passages qu’il croyait, lui, les plus lyriques. (…)

Extrait de « Sur Proust » de Jean-François Revel publié avec « Pourquoi des philosophes, La Cabale des Dévots, Contrecensures, Descartes inutile et incertain » dans la collection Robert Laffont.

L’analyse de Jean-François Revel sur Proust est passionnante et je vous en recommande la lecture. C’est extrêmement intelligent, c’est une autre lecture de Proust qui nous est offerte.

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