mercredi 18 mars 2009

Emotion



Emotion de retrouver ce plumier chez maman, il a été utilisé par au moins deux générations. Quels messages ? Nul ne sait, cet objet me fait rêver.
Relu également ce texte de Maupassant que j'ai lu tant de fois en dictée, pour l'étude des accords des participes passés particulièrement redoutables, et dont j'éprouve intimement les mots aujourd'hui.

Puis en rôdant par tous les coins de cette demeure qu’elle allait abandonner, elle monta, un jour dans le grenier.
Elle demeura saisie d’étonnement ; c’était un fouillis d’objets de toute nature, les uns brisés, les autres salis seulement, les autres montés là on ne sait pourquoi, parce qu’ils ne plaisaient plus, parce qu’ils avaient été remplacés. Elle apercevait mille bibelots connus jadis, et disparus tout à coup sans qu’elle y eût songé, des riens qu’elle avait maniés, de vieux petits objets insignifiants qui avaient traîné quinze ans à côté d’elle, qu’elle avait vus chaque jour sans les remarquer, et qui, tout à coup retrouvés là, dans ce grenier, à côté d’autres plus anciens dont elle se rappelait parfaitement les places aux premiers temps de son arrivée, prenaient une importance soudaine de témoins oubliés, d’amis retrouvés. Ils lui faisaient l’effet de ces gens qu’on a fréquentés longtemps sans qu’ils se soient jamais révélés et qui soudain, un soir, à propos de rien, se mettent à bavarder sans fin, à raconter toute leur âme qu’on ne soupçonnait pas.
Elle allait de l’un à l’autre avec des secousses au cœur(…). Il y avait aussi là-dedans beaucoup de choses qu’elle ne connaissait pas, qui ne lui rappelaient rien, venues de ses grands-parents, ou de ses arrière-grands-parents, de ces choses poudreuses qui ont l’air exilées dans un temps qui n’est plus le leur, et qui semblent tristes de leur abandon, dont personne ne sait l’histoire, les aventures, personne n’ayant vu ceux qui les ont choisies, achetées, possédées, aimées, personne n’ayant connu les mains qui les maniaient familièrement et les yeux qui les regardaient avec plaisir. (…)

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Je le reconnais, ce texte repris dans le Bled, un beau texte qui donne envie de relire "Une vie".
Votre billet me fait penser à l'encrier de mon grand-père (instituteur, je l'ai peu connu), conservé sur mon bureau.
Bonjour de Bruxelles sous le soleil depuis quelques jours, enfin.

Unknown a dit…

Il est très beau et très touchant ce texte, Racine.
Je t'embrasse

Franck a dit…

Je reviens sur cet article que j'ai lu il y a déjà quelques temps, mais sur lequel je n'avais pas laissé de commentaire... peut-être parce que tout y est dit. J'adore !